Archives Saison 2019–2020

Edito Plaquette de la saison
15–16.06
2019

MIRACLES À...

Adapté du film de Vittorio de Sica – Miracle à Milan
Mise en scène : Domenico Carli

15–06.10
2019

LA VOIX DE L'OMBRE
À la Fondation de l'Hermitage - Lausanne

Création

Mise en scène : Omar Porras
Jeu : Emmanuelle Ricci

 

18–22.09
2019

INCERTAIN MONSIEUR TOKBAR

Écriture, mise en scène :
Emili Hufnagel et Michel Laubu

01–06.10
2019

KOBURO

Conception et mise en scène :
Christian Denisart

29–17.11
2019

LE ROI SE MEURT

Texte : Eugène Ionesco
Mise en scène :
Cédric Dorier

Création

05.11
2019

TABARNAK

Cirque Alfonse

Mise en scène :
Alain Francoeur

10.11
2019

PAROLE D'ACTEUR

De et par :
Maurice Durozier

26.11
2019

BACH : SUITES ANGLAISES

Cédric Pescia :
Piano

27.11
2019

PRESQUE ÉGAL À

Texte :
Jonas Hassen Khemiri

Mise en scène :
Laurent Vacher

27.11
2019

JAZZ : MARC PERRENOUD

Marc Perrenoud :
Piano

28.11
2019

JAZZ : MARIE KRUTTLI

Marie Kruttli :
Piano

29.11
2019

JAZZ : YANNICK DELEZ

Yannick Delez
Piano

30.11
2019

BACH : TOCCATAS

Cédric Pescia :
Piano

01–08.12
2019

LE VERBE DE BACH LA MUSIQUE DE LA BIBLE

Cédric Pescia et Omar Porras

03.12
2019

FRÄULEIN AGNES

Texte :
Rebekka Kricheldorf

Mise en scène :
Florence Minder

07.12
2019

BOLEROS ET AUTRES CONTES VAGABONDS

Siga Volando

10–15.12
2019

ALBUM DE FAMILLE

Mise en scène :
Isabelle Turschwell et Lauri Lupi

19.12
2019

BAL LITTÉRAIRE LATINO

14–26.01
2020

ET J’AI CRIÉ ALINE

D’APRÈS C.F. RAMUZ
MISE EN SCÈNE:
THIERRY ROMANENS ET ROBERT SANDOZ
TRIO FORMAT A’3

CRÉATION

19–09.02
2020

PROJET XVII : MARY SHELLEY
FRANKENSTEIN OU LE PROMÉTHÉE MODERNE

GUILLAUME PI
MICHAEL BORCARD
CRÉATION

04–14.02
2020

L'HOMME DE PLEIN VENT

CRÉATION :
PIERRE MEUNIER ET HERVÉ PIERRE

17–09.04
2020

LE CONTE DES CONTES – ANNULÉ
d'après Giambattista Basile

CONCEPTION ET MISE EN SCÈNE :
OMAR PORRAS
ADAPTATION ET TRADUCTION :
MARCO SABBATINI ET OMAR PORRAS
PAR LE TEATRO MALANDRO
CRÉATION

17–30.04
2020

Situation Coronavirus
Annonce au public

29–09.05
2020

LA MOUCHE – ANNULÉ

LIBREMENT INSPIRÉ DE LA NOUVELLE DE GEORGE LANGELAAN
ADAPTATION ET MISE EN SCÈNE :
VALÉRIE LESORT ET CHRISTIAN HECQ

19.05
2020

BEETHOVEN – LISZT – ANNULÉ

PHILIPPE CASSARD, PIANO
CÉDRIC PESCIA, PIANO

20.05
2020

BRAHMS – ANNULÉ
INTÉGRALE DES TRIOS

23.05
2020

PORTRAIT CHRISTIAN FAVRE – ANNULÉ

24.05
2020

BEETHOVEN – ANNULÉ
ELISABETH LEONSKAJA, PIANO

Edito

Omar Porras

« CETTE MAISON EST ENCHANTÉE !
ICI SE CÔTOIENT MADAME LA LUNE,
FRANKENSTEIN, POULPIQUET ET SATYRE,
LE FOU, L’ENFANT ET LE ROI.
ET SUR L’ARBRE,
UNE FÊNETRE CONTEMPLE L’INFINI… »

Ça peut paraître incroyable, mais c’est vrai : j’ai croisé un enfant sur une place qui m’a raconté l’histoire d’un ramoneur fou, qui croyait avoir vu sur la cheminée d’une vieille usine à gaz…
…un éléphant qui jouait de la batterie,
…un fantôme en talons aiguilles qui s’exerçait à la pétanque,
…un kangourou de la taille d’une fourmi en habit de roi,
…un iguane qui buvait du café à l’heure du thé…

Les paroles de cet enfant, plus sage que la raison, coulaient comme le vent dans la nature, faisant renaître une forêt interminable de merveilles devant mes yeux. Il disait que le ramoneur fou avait vu entrer par la cheminée de cette usine à gaz de Renens, il y a exactement quarante ans, une légion de bardes, à la fois prestidigitateurs et artisans, tous tailleurs de bois, de pierres et de métaux précieux ; peintres, maçons, charpentiers, tonneliers, moucheurs de chandelles : poètes, mais aussi joueurs de musiques célestes.

Un personnage épico-romantique, élégant chevalier à la moustache blanche et qui inspire le respect comme dans les romans de chevalerie, du nom de Philippe Mentha, dirigeait ces talentueux connaisseurs et détenteurs d’arcanes.

Le fabuleux récit de l’enfant décrivait comment ces femmes et ces hommes prodiguaient des sortilèges, faisaient jaillir sous le toit de leur nouvelle maison des châteaux légers comme les nuages, des lunes enveloppées de flammes, des rivières de larmes de joie et des remèdes pour faire ressusciter des pharaons déjà momifiés.

Le ramoneur lui avait raconté avec conviction, me disait l’enfant, qu’il entendait encore à l’intérieur de la cheminée résonner l’écho de toutes les expériences du monde, la vigueur des combats de la Grèce antique, les hymnes enivrants de la luxuriante Rome, les récits mystiques du Moyen-Âge, les allégories des troubadours et d’autres aventures truculentes qu’encore aucun mortel n’avait osé imaginer.

C’est ainsi, concluait le ramoneur fou, que ces femmes et ces hommes, ardents scrutateurs du langage et dotés d’une mémoire séculaire, ont fondé à Renens, en 1979, avec Les trois Sœurs d’Anton Tchekhov, le Théâtre Kléber-Méleau, le TKM.

Cet exploit peut paraître insolite, mais une chose est sûre : ce sont bien ces travaux, ces gestes et la foi imperturbable de nos aînés, qui sont la source de ce que nous devons continuer à faire entendre à notre public sous le toit et dans les entrailles de cette fabrique à rêves.

L’enfant me raconta enfin que le ramoneur l’avait pris par la main et lui avait remis une liste de travaux à exécuter et d’histoires à raconter cette saison, ici, au TKM.
Il m’a dit : « introduis-toi prudemment dans le sommeil des hommes et souffle ces paroles ailées dans leurs imaginaires. » L’enfant disparut alors sous un pont de fumée dorée projetée par le souffle d’un Zéphyr.

Et la voici, cette liste, en un avant-goût de ce que vous pourrez découvrir en lisant la suite de ce Livre de saison.

Tout d’abord, vous allez sonder, comme en un divin rêve éveillé, la vie d’un certain monsieur Tokbar, ancien professeur d’histoire, qui cherchant dans sa poche les clés perdues de sa « motobylette », part dans un voyage au cœur de son imaginaire et du joyeux capharnaüm de ses souvenirs pour convoquer les hippocampes-magasiniers, les chevaliers-robinets d’eau froide et d’eau chaude, le roi Arthur, les frères Louis et Neil Armstrong, le général carthaginois Hannibal, et tant d’autres personnages venus d’un pays chimérique appelé « la Turakie ».

Ce voyage dans le temps nous permettra de rencontrer l’explorateur exotico-futuriste, Christian Denisart, avec sa dernière découverte anthropologique : cinq Koburo, aussi mystérieuses que sensuelles, qui communiquent avec nous par la musique et se referment comme des fleurs dans des « éventails corporels ».

Viendront également dans notre univers deux chevaliers contemporains détermi- nés à libérer l’humanité d’un ennemi de poids : la Pesanteur. L’obstiné Leopold Von Fligenstein (Pierre Meunier) et son complice, Victor Kutsch (Hervé Pierre), ancien vérificateur des Poids et Mesures, vont assurer leurs envols et leurs chutes, leurs suspensions et leurs équilibres, le lancement de boulets vers l’espace, pour nous garantir une libération joyeuse et un allègement salutaire.

Et nous assisterons en direct à la déshumanisation de Robert, un apprenti sorcier qui nous conduit dans cette « chambre-laboratoire » où il tente de mettre au point une machine à téléporter, non sans conséquences. Une histoire de George Langelaan que David Cronenberg avait portée sur le grand écran, et réinventée avec ingéniosité et talent par Valérie Lesort et Christian Hecq. Tandis que non loin dans le temps et dans notre théâtre, le 3e, 4e et 6e dimanche de l’année 2020, à 11h du matin, nous aurons la visite du genevois Victor Frankenstein et de sa créature hideuse, revisitée par les poètes Guillaume Pi et Michael Borcard.

Que de nouveaux royaumes, que de nouveaux empires nous allons découvrir en cette saison qui sera un véritable hommage à l’imaginaire et dont Parole d’acteur (de Maurice Durozier) et Album de famille (par Isabelle Turschwell et Lauri Lupi) seront aussi à penser comme des manifestes sur cette force d’évocation de la fabrique théâtrale !

Dans cette même veine où fiction, fantaisie et réel se mêlent, tous les mortels et les immortelles découvriront aussi, au TKM, trois de nos créations, conçues et engendrées dans nos ateliers et sur notre plateau.

D’autres créatures étranges y naîtront, tel le Roi Bérenger 1er – qui prétend mourir que lorsqu’il le souhaite dans la « chronique d’une mort annoncée », Le Roi se meurt d’Eugène Ionesco, avec une mise en scène à naître de Cédric Dorier.

Puis «à l’heure où les petites grenouilles souffrent au creux des mottes, à cause du soleil qui a bu la rosée », arrivera Aline, jeune et jolie, naïve et pauvre, qui s’est éprise de Julien, le fils du syndic du village, beau, malin et riche… Ils dansent sous le grand poirier. Elle ferme les yeux et tombe enceinte. C’est le drame ! Tendre, sensuel, poétique et cruel : c’est Ramuz ! Musical, fugace, enthousiaste, impertinent « comme un enfant qui joue, sans conscience des éclaboussures » : c’est Thierry Romanens, accompagné de ses complices de Format A’3.

Et comme corollaire à toute cette fantaisie, la troisième création du TKM nous emmène naturellement dans la rivière turbulente de l’émoi, du frisson, du rire et de l’horreur, pour découvrir ce qu’il y a de secret et d’invisible derrière les contes, les fables, les mythes et même les chansons populaires, dormant depuis six lustres dans le ventre du griffon du Teatro Malandro. « Il n’y a que l’invisible qui nous émeuve », nous disait Théodore Jouffroy dans son Cours d’esthétique, mais le mystérieux aussi, l’inconnu, le frémissant, et même la peur sont des sentiments qui habillent notre curiosité et stimulent notre palpitant imaginaire. Voilà une entreprise «grandguignolesque» du Teatro Malandro pour célébrer ses trente premières années.

Tous ces lieux, toutes ces créatures que nous allons côtoyer cette saison sont une victoire de notre imagination, car elles transgressent les règles du réel et de la raison. Et au cœur de la puissance du théâtre, de cet art du verbe et du geste, il y a l’énergie invisible qui sublime tous les états d’esprit de l’homme, de la nature : la musique ! Elle sera encore dans la matrice de nos jours, et notre « grand Cantor du TKM », Cédric Pescia, avec qui nous continuons cette saison nos pèlerinages musicaux et bibliques, nous emmènera en compagnie d’autres grands interprètes guidés par le talent qui jaillit du bout de ses doigts comme une émanation bienveillante, pour partager, exulter, jubiler et célébrer les œuvres monumentales de Jean-Sébastien Bach, Ludwig van Beethoven, Franz Liszt et Johannes Brahms.

Et sigamos volando, continuons à voler ! Résonnez timbales ! Sonnez trompettes ! … pour annoncer le Bal littéraire latino, avec Fabrice Melquiot, ses complices-poètes et le Grand Orchestre suisso-cubain, Siga Volando, pour des soirées dansantes !

Eh oui, cher public ! Moi aussi, comme vous, je suis cet enfant, spectateur et protagoniste, lecteur et langage, songe et cauchemar, qui continue à croire à toutes ces célébrations et à toutes ces « histoires d’enfants », car elles nous offrent une myriade d’amis (fantômes bienveillants, dragons compagnons, anges gardiens, chevaliers fous et héroïques) qui sont à la fois le fruit de ma désobéissante curiosité et de notre vagabond imaginaire collectif. Toutes ces histoires prouvent qu’au théâtre, sur le plateau « ces personnages nous lisent mieux que ce que nous pouvons les lire » : ils sont le miroir de la vie…

Venez célébrer avec nous, au TKM, les mystères insondables de l’existence humaine, en fanfare et musique, en costumes et dans la joie !

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